«Le traitement préventif du trouble bipolaire doit rester conforme aux recommandations en cas d’addiction associée.»
Dr Romain Icick, psychiatre et addictologue à l’hôpital Lariboisière - Fernand Widal (AP-HP).
Il n’existe pas de recommandation formelle sur la conduite du traitement médicamenteux du trouble bipolaire en cas d’addiction, qui touche pourtant jusqu’à un individu avec trouble bipolaire sur deux. Ces addictions comportent un risque de non-conformité aux médicaments recommandés par les sociétés savantes, et leur présence diminue la réponse au traitement usuel. Cette non-conformité inclut notamment les antidépresseurs, qui comportent un risque d’accélération des cycles du trouble bipolaire, et les benzodiazépines, qui comportent des risques addictifs et cognitifs.
A partir des données collectées par une collaboration de longue date avec l’Université d’Oslo coordonnée par les Prs Etain et Bellivier, l’analyse de 770 patients sous traitement médicamenteux préventif du trouble bipolaire et suivis dans des centres universitaires spécialisés n’a pas retrouvé de différence significative entre les médicaments pris par les participants selon qu’ils souffraient également d’addiction ou non. Cependant, les participants Norvégiens entrés en soins pour un 1er épisode du trouble bipolaire avaient un risque accru d’absence de traitement préventif en cas d’addiction à l’alcool, et les participants Français recevaient plus souvent des antipsychotiques en cas d’addiction au cannabis.
Ces travaux s’inscrivent dans la perspective d’une médecine personnalisée du trouble bipolaire en fonction du profil des patients, mais suggèrent également que les traitements habituellement recommandés dans le trouble bipolaire gardent leur place même en présence d’addiction associée. Au total, il est urgent de développer des algorithmes thérapeutiques mieux adaptés à ces individus porteurs de doubles pathologies pour mieux guider les cliniciens et améliorer les prises en charge.