Le suicide en France : une situation alarmante
- En France, un décès par suicide survient toutes les 40 minutes et une tentative de suicide toutes les 4 minutes.
- Ainsi, les conduites suicidaires sont à l’origine de plus de 10 000 décès et 200 000 tentatives de suicide par an sur le territoire national.
- Elles représentent la deuxième cause de mortalité des personnes de 15 à 44 ans.
Plus alarmant, ces chiffres ne diminuent pas ou très lentement et on redoute une augmentation importante du nombre de morts, l’importante génération de baby boomers atteignant une période à risque.
Enfin, au coût humain et aux drames intimes qui accompagnent les conduites suicidaires, s’ajoute un impact économique d’importance. De récents travaux en économie de la santé ont ainsi évalué les coûts directs associés aux suicides (31 millions d’euros) et aux tentatives de suicide (497 millions d’euros).
Ces chiffres accablants témoignent de l’importance comme de la gravité du phénomène.
Pour relever les défis de la prévention du suicide, il faut…
- Lutter contre les préjugés et les idées reçues qui accompagnent souvent la perception des conduites suicidaires par le grand public et les médias (acte d’autodétermination, expression du libre arbitre, conséquence des politiques managériales dans l’entreprise, etc.) et font écran à une approche médicale et scientifique de ce problème de santé publique majeur.
- Renforcer les stratégies de prévention des récidives: nombre de travaux scientifiques ont en effet démontré la pertinence et l’efficacité de systèmes de veille afin de prévenir les récidives.
- Soutenir l’effort de recherche pour améliorer notre compréhension des mécanismes liés à l’acte suicidaire et permettre de détecter les sujets les plus à risque avant qu’ils ne passent à l’acte et identifier de nouvelles stratégies thérapeutiques.
Comprendre la vulnérabilité au suicide
Contrairement aux idées reçues, le geste suicidaire n’est pas le fruit d’un acte d’autodétermination ou de libre arbitre, ou encore un chantage vis-à-vis de l’entourage. Il résulte d’une souffrance psychologique extrême, jugée insupportable par les personnes qui en sont victimes.
Les travaux de recherche de ces dernières années ont démontré que nous ne sommes pas tous égaux face au risque de suicide et qu’il existe une vulnérabilité suicidaire. Celle-ci nous rendrait plus fragile en cas d’exposition à des événements de vie douloureux (perte d’un emploi, deuil, difficultés conjugales…), favorisant le passage à l’acte.
Comprendre les mécanismes de cette vulnérabilité suicidaire est d’une importance majeure: aujourd’hui, les seuls indices cliniques ne permettent pas de détecter avec précision le risque suicidaire d’un individu à un moment donné. Il est essentiel d’identifier des marqueurs biologiques attachés au risque de suicide si nous voulons développer des stratégies diagnostiques et préventives.
Cet axe de recherche, enjeu majeur de santé publique, est une vraie urgence destinée à relever l’un des défis les plus complexes de la pratique clinique quotidienne.
Pr Philippe Courtet
Ce que l’on sait aujour’dhui des facteurs de risque
De nombreux travaux ont démontré que la vulnérabilité suicidaire naîtrait de la rencontre entre un «terrain génétique» particulier et des facteurs environnementaux spécifiques… Le seul «terrain génétique» ne suffit donc pas à expliquer les passages à l’acte et les chercheurs s’intéressent, depuis plusieurs années, aux facteurs environnementaux impliqués dans les conduites suicidaires.
- Le rôle des traumatismes infantiles, du stress post-traumatique ou encore des altérations du sommeil a été particulièrement étudié.
- Les études génétiques ont quant à elles permis de mettre à jour l’implication de certaines voies biologiques intervenant sur l’impulsivité et l’anxiété.
- D’autres travaux ont établi un lien entre mécanisme inflammatoire et risque suicidaire.
- Enfin, la neuro-imagerie est également riche d’enseignements, suggérant que les personnes à risque de suicide seraient particulièrement sensibles aux expériences d’isolement, de rejet social ou de désaprobation.
Une chaire de prévention du suicide
La Fondation FondaMental a créé, avec le soutien de la SNCF et de mécènes privés, une chaire de prévention du suicide, portée par le Pr Philippe Courtet, professeur de psychiatrie à l’Université de Montpellier, responsable du service d’urgences et post-urgences psychiatriques du CHU de Montpellier, chercheur à l’Inserm et spécialise international de la recherche sur les facteurs de risque du suicide.
Cette chaire a deux objectifs:
- Progresser dans l’identification des facteurs prédictifs (cliniques, environnementaux, et biologiques) de survenue de conduites suicidaires, à partir d’une étude de suivi de sujets à haut risque suicidaire (idées et tentatives de suicide).
- Améliorer la mesure et le suivi du risque suicidaire en temps réel grâce au développement d’outils connectés.
L’identifcation des mécanismes biologiques impliqués est un enjeu de taille: c’est une étape essentielle pour découvrir des marqueurs biologiques susceptibles d’aider au repérage des personnes à risque et d’innover dans la prise en charge des patients.
Pr Courtet
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